Assemblée nationale : Comment ça marche ?

20/06/2012 à 06h18, Auteur : rédac-rss // Actualités-vie pratique

 38% des députés ont été élus pour la première fois.

Sur les 577 élus, 344 soit près de 60% sont des députés sortants ; 217 - soit 38% - sont élus pour la première fois et 16 sont d’anciens députés.

 

La nouvelle Assemblée comptera 155 femmes, soit près de 27% de l’ensemble des élus. C’est 45% de plus par rapport à juin 2007 au début de la XIIIème législature, qui comptait 107 députées. 

C’est aussi le record de la Vème République qui avait commencé en 1958 avec seulement 9 députées.

 

Le statut du député

Élu pour représenter la Nation, le député participe à l’exercice de la souveraineté nationale. Il vote la loi et contrôle l’action du Gouvernement. Il bénéficie, comme le sénateur, d’un statut protecteur, conçu non comme un privilège mais comme un moyen destiné à lui assurer l’indépendance et la liberté d’expression nécessaires à l’exercice de son mandat. Cette protection spécifique est consacrée par le principe des immunités parlementaires, qui trouvent leur fondement dans la Constitution elle-même.

 

La reconnaissance d’un statut spécifique impose des contreparties, le mandat devant être préservé de toute influence pouvant en contrarier le libre exercice. Aussi les parlementaires sont-ils soumis à diverses obligations et interdictions.

 

Au-delà des droits et obligations liés au mandat parlementaire, le député peut également exercer ès qualités diverses responsabilités au sein et en dehors de l’Assemblée nationale.

I. – L’immunité parlementaire

On qualifie d’immunité parlementaire l’ensemble des dispositions qui assurent aux parlementaires un régime juridique dérogatoire au droit commun dans leurs rapports avec la justice afin de préserver leur indépendance.

 

Le souci de concilier la nécessaire protection de l’exercice du mandat parlementaire et le principe de l’égalité des citoyens devant la loi a conduit à distinguer deux catégories d’immunités : l’irresponsabilité et l’inviolabilité.

 

1. – L’irresponsabilité

L’irresponsabilité, immunité absolue, soustrait les parlementaires à toute poursuite pour les actes liés à l’exercice de leur mandat. Elle est établie par la Constitution dont l’article 26, dans son premier alinéa, dispose « qu’aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions ».

 

L’irresponsabilité couvre tous les actes de la fonction parlementaire : interventions et votes, propositions de loi, amendements, rapports ou avis, questions, actes accomplis dans le cadre d’une mission confiée par les instances parlementaires.

 

Elle protège les parlementaires contre toute action judiciaire, pénale ou civile, motivée par des actes qui, accomplis hors du cadre d’un mandat parlementaire, seraient pénalement sanctionnables ou susceptibles d’engager la responsabilité civile de leur auteur (diffamation ou injure par exemple).

 

Toutefois, la jurisprudence a exclu les propos d’un parlementaire au cours d’un entretien radiodiffusé ou les opinions exprimées par un parlementaire dans le rapport rédigé dans le cadre d’une mission confiée par le Gouvernement.

 

Même si elle assure une protection très large, elle n’entraîne pas l’immunité totale puisque, pour leurs interventions en séance publique, les députés restent toujours soumis au régime disciplinaire prévu par le Règlement de l’Assemblée.

 

Dans son domaine d’application, l’irresponsabilité a un caractère absolu, car aucune procédure ne permet de la lever. Elle est permanente, car elle s’applique toute l’année y compris pendant l’intersession. Elle est perpétuelle et s’oppose aux poursuites motivées par les actes accomplis durant le mandat, même après la fin de celui-ci. La mise en œuvre de l’irresponsabilité relève de la compétence exclusive des autorités judiciaires. Elle constitue un moyen d’ordre public ; aussi le parlementaire ne peut-il y renoncer.

 

2. – L’inviolabilité

L’inviolabilité tend à éviter que l’exercice du mandat parlementaire ne soit entravé par certaines actions pénales visant des actes accomplis par les députés en tant que simples citoyens. Elle réglemente les conditions dans lesquelles s’exerce l’action pénale pour les actes étrangers à sa fonction.

 

Si, depuis la réforme du 4 août 1995, le régime de l’inviolabilité ne protège plus le député contre l’engagement de poursuites (mise en examen), par contre, le député ne peut faire l’objet d’une arrestation ou de toute autre mesure privative ou restrictive de liberté (contrôle judiciaire) sans l’autorisation du Bureau, sauf les cas de crime ou délit flagrant, ou de condamnation définitive. En outre, la détention, les mesures privatives ou restrictives de liberté, ou la poursuite d’un député, sont suspendues pour la durée de la session si l’Assemblée le requiert.

 

L’inviolabilité est exclusivement attachée à la personne des parlementaires. Elle ne joue qu’en matière criminelle et correctionnelle.

 

Contrairement à l’irresponsabilité dont les effets ne sont pas limités dans le temps, l’inviolabilité a une portée réduite à la durée du mandat.

 

- Les demandes d’autorisation d’arrestation ou de mesures privatives ou restrictives de liberté concernant un député sont formulées par le procureur général près la cour d’appel compétente, transmises par le Garde des Sceaux au Président de l’Assemblée nationale, instruites par une délégation du Bureau puis examinées par le Bureau. La demande ne fait l’objet d’aucune publication et la plus grande confidentialité entoure leur examen. Seule la décision du Bureau est publiée au Journal officiel et au Feuilleton.

 

Le Bureau a pour seul rôle de se prononcer sur le caractère sérieux, loyal et sincère de la demande. Des décisions intervenues depuis la révision constitutionnelle de 1995, il semble ressortir que le pouvoir d’appréciation du Bureau l’autorise non seulement à accepter ou rejeter globalement la requête mais, le cas échéant, à n’en retenir que certains éléments.

 

- Les demandes de suspension des poursuites, des mesures privatives ou restrictives de liberté, ou de la détention, sont adressées au Président de l’Assemblée par un ou plusieurs députés, distribuées puis renvoyées à la commission constituée en application de l’article 80 du Règlement, qui doit entendre le député concerné ou le collègue qu’il a chargé de le représenter et présenter un rapport. Dès la distribution de ce dernier, la discussion de la demande est inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée. L’examen en séance fait alors l’objet d’un débat limité au terme duquel l’Assemblée se prononce. La décision de l’Assemblée s’impose aux autorités administratives et judiciaires. Elle entraîne, pour la durée de la session, soit la suspension de toute procédure judiciaire, soit la levée du contrôle judiciaire et la mise en liberté du député détenu, soit l’une ou l’autre seulement de ces deux mesures.

 

II. – Les incompatibilités

Liée au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs, l’incompatibilité se définit comme l’impossibilité légale de cumuler certaines fonctions avec le mandat parlementaire. Édictées d’abord dans le domaine des fonctions publiques, les incompatibilités ont été par la suite étendues à certaines fonctions exercées dans le secteur privé. À la différence de l’inéligibilité, l’incompatibilité n’empêche pas a priori l’élection, mais elle impose a posteriori un choix à l’élu.

 

1. – Les incompatibilités avec les fonctions publiques électives

Est interdit le cumul des mandats de député et de sénateur et de député et de membre du Parlement européen, ainsi que, bien qu’aucun texte ne le prévoie, le cumul avec les fonctions de Président de la République.

 

En outre, la loi organique du 5 avril 2000 a rendu le mandat parlementaire incompatible avec l’exercice de plus d’un des mandats ou fonctions suivants : conseiller régional, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller à l’Assemblée de Corse, conseiller municipal d’une commune d’au moins 3 500 habitants.

 

En revanche, le cumul entre un mandat parlementaire et une fonction exécutive locale (président de conseil régional, président de conseil général, maire) demeure autorisé.

 

2. – Les incompatibilités avec les fonctions publiques non électives

Dans le souci de dégager les parlementaires des liens de dépendance qu’ils pourraient avoir avec un autre pouvoir ou une autre autorité, les députés ne peuvent cumuler leur mandat avec les fonctions de membre du Gouvernement, du Conseil constitutionnel ou du Conseil économique, social et environnemental, de magistrat et de membre du Conseil supérieur de la magistrature.

 

De manière plus générale, l’exercice de fonctions publiques non électives est incompatible avec l’exercice du mandat parlementaire et les fonctionnaires qui sont dans cette situation au moment de leur élection doivent être placés en position de détachement. Tout au plus, peuvent-ils continuer d’exercer certaines fonctions dans l’enseignement supérieur.

 

Les missions temporaires confiées par le Gouvernement sont compatibles avec le mandat parlementaire, à condition de ne pas excéder une durée de six mois.

 

3. – Les incompatibilités avec les autres activités professionnelles

L’évolution du rôle de l’État, le poids de certains intérêts dans la vie collective ont conduit à interdire aux parlementaires l’exercice de fonctions déterminées dans des catégories d’entreprises limitativement énumérées ainsi que l’accomplissement de certains actes.

 

Est ainsi prohibé le cumul avec des fonctions de direction dans des entreprises nationales ou des établissements publics nationaux, c’est-à-dire des organismes dépendant étroitement de la puissance publique (sauf si les parlementaires ont été désignés en cette qualité comme membres du conseil d’administration en application des textes organisant les entreprise nationales ou les établissements publics).

 

De même, le cumul est interdit avec l’exercice de fonctions de direction dans certaines sociétés ou entreprises privées bénéficiant d’avantages accordés par l’État ou les collectivités publiques en vertu d’une réglementation propre, celles ayant exclusivement un objet financier ou faisant publiquement appel à l’épargne, les sociétés travaillant principalement pour le compte ou sous le contrôle de l’État ou d’une personne publique et les sociétés exerçant certaines activités immobilières à but lucratif.

 

Enfin, il est interdit aux parlementaires exerçant la profession d’avocat de plaider contre l’État, les sociétés nationales, les collectivités ou établissements publics et à tout parlementaire de faire ou de laisser figurer son nom suivi de l’indication de sa qualité dans toute publicité relative à une entreprise financière industrielle ou commerciale.

 

4. – Le contrôle et les sanctions

Afin de permettre le contrôle des activités professionnelles incompatibles avec le mandat parlementaire par le Bureau de l’Assemblée, les députés doivent, dans les deux mois de leur entrée en fonction, se démettre de leurs activités incompatibles et remettre au Bureau une déclaration des activités professionnelles ou d’intérêt général qu’ils se proposent de poursuivre. L’absence du dépôt est assortie d’une sanction sévère, la démission d’office.

 

En cas de doute ou de contestation, le Bureau saisit le Conseil constitutionnel. Le Garde des Sceaux et le parlementaire concerné peuvent également le saisir. Si le Conseil constate l’incompatibilité d’une fonction, le parlementaire dispose alors d’un délai de 15 jours pour régulariser sa situation. En l’absence de régularisation dans ce délai, il est déclaré démissionnaire d’office de son mandat par le Conseil constitutionnel.

 

En matière de cumul de mandats, le député dispose d’un délai de deux mois pour démissionner du mandat ou de la fonction de son choix. À défaut, il est mis fin au mandat dont l’acquisition est à l’origine de la situation de cumul.

 

Enfin, lorsqu’un acte interdit en matière de plaidoirie ou d’usage du titre de député a été commis, la sanction est d’application immédiate. Le député fautif est déclaré démissionnaire d’office par le Conseil constitutionnel à la requête du Bureau ou du Garde des Sceaux.

 

III. – Les obligations et interdictions qui s’appliquent aux députés

1. – Les interdictions spécifiques

Ces interdictions qui visent certains actes déterminés ou certaines situations, répondent principalement à la préoccupation de moralisation de la vie politique :

 

- pour soustraire le parlementaire aux éventuelles promesses du Gouvernement, un député ou un sénateur ne peut, sauf certaines exceptions, recevoir aucune décoration française durant son mandat ;

 

- pour éviter toute atteinte à la dignité de la fonction parlementaire, un député ou un sénateur ne peut user de sa qualité à des fins publicitaires ;

 

- pour éviter qu’un organe de presse ne se retranche derrière l’immunité de son directeur parlementaire afin de se soustraire aux poursuites en cas de délit de presse, l’entreprise doit, si son directeur de publication est député, nommer un codirecteur de la publication choisi parmi les personnes ne bénéficiant pas de l’immunité parlementaire. Il en est de même pour les services de communications au public par voie électronique (sites Internet).

 

2. – Déclaration de patrimoine

Le statut juridique et financier du parlementaire a pour contrepartie une obligation de transparence. C’est à cette fin qu’un système de contrôle permettant de vérifier que l’exercice du mandat parlementaire n’est pas source d’enrichissement indu, a été mis en place à partir de 1988.

 

L’obligation de déclaration de patrimoine en début et fin de mandat a pour objet d’éviter qu’un parlementaire ne profite de ses fonctions électives pour s’enrichir abusivement.

 

À cette fin, chaque député est tenu de déposer auprès de la Commission pour la transparence financière de la vie politique (CTVP), dans les deux mois qui suivent son entrée en fonction, une déclaration certifiée sur l’honneur exacte et sincère de sa situation patrimoniale concernant la totalité de ses biens propres ainsi que, éventuellement, ceux de la communauté ou les biens réputés indivis. Ces biens sont évalués à la date de l’élection.

 

Une nouvelle déclaration de situation patrimoniale devra être déposée auprès de la même instance deux mois au plus tôt et un mois au plus tard avant l’expiration du mandat.

 

En cas de non-respect de cette obligation, la Commission pour la transparence financière de la vie politique saisit le Bureau de l’Assemblée nationale qui transmet au Conseil constitutionnel. Celui-ci constate, le cas échéant, l’inéligibilité et, par la même décision, déclare le député démissionnaire d’office.

 

En outre, si la commission chargée du contrôle estime insuffisantes les explications fournies par le parlementaire, elle peut saisir le parquet.

 

IV. – Les fonctions autorisées du député

Les députés sont appelés à assumer d’autres fonctions que celles exercées au sein de l’Assemblée, et qui se rattachent à l’exercice de leur mandat.

 

Certaines prérogatives sont exercées de plein droit, soit à titre personnel, soit ès qualités par les détenteurs de certains postes particuliers au sein de l’Assemblée :

 

− représentation de l’Assemblée nationale au sein d’organismes extraparlementaires, c’est-à-dire des organismes dans lesquels siègent des députés en vertu d’un texte législatif ou réglementaire (exemples : conseil d’administration de France Télévisions, commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, conseil d’orientation des retraites, conseil national du bruit, etc.) ;

 

− exercice, pour le compte du Gouvernement qui le désigne, d’une « mission temporaire » d’une durée maximale de six mois (cf. supra).

 

 

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