Zone euro : création du mécanisme européen de stabilité

29/02/2012 à 00h07, Auteur : rédac-rss // Actualités-vie pratique

Zone euro : création du mécanisme européen de stabilité

Les sénateurs examinent le projet de loi autorisant la ratification du traité instaurant le MES

 

Les sénateurs ont examiné hier dans l’après-midi le projet de loi autorisant la ratification de la décision du Conseil européen modifiant l’article 136 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne en ce qui concerne un mécanisme de stabilité pour les Etats membres dont la monnaie est l’euro.

 

Ce texte s’inscrit dans le cadre de la stratégie globale mise en œuvre afin de préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble. La ratification de la décision du Conseil européen modifiant l’article 136 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne est un préalable à la création du MES.

Les sénateurs examineront ensuite le projet de loi autorisant la ratification du traité instituant le mécanisme européen de stabilité (MES).

La commission des finances, réunie le 21 février, propose au Sénat de s’abstenir sur ces deux projets de loi. 

 

Le groupe UMP a, quant à lui, déclaré qu’il voterait pour la ratification de ces deux textes en séance publique.

A. DANS LE CAS DU PROJET DE LOI TENDANT À AUTORISER LA RATIFICATION DU TRAITÉ INSTITUANT LE MÉCANISME EUROPÉEN DE STABILITÉ, UNE INCERTITUDE JURIDIQUE À LEVER

 

1. La LOLF prévoit que l’octroi de la garantie de l’Etat doit être autorisé par une loi de finances

D’après l’article 34 de la LOLF, « dans la seconde partie, la loi de finances de l’année (...) autorise l’octroi des garanties de l’Etat et fixe leur régime ». Par ailleurs, selon son article 61, « dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi organique, toute garantie de l’Etat qui n’a pas été expressément autorisée par une disposition de loi de finances doit faire l’objet d’une telle autorisation ».

Ainsi, l’Etat a été autorisé à accorder sa garantie au FESF par l’article 3 de la loi n° 2010-606 du 7 juin 2010 de finances rectificative pour 2010.

 

2. Le traité relatif au MES implique l’octroi d’une forme de garantie par la France

Le Gouvernement considère en revanche que le capital appelable du MES ne peut être assimilé à une garantie, et n’a donc pas besoin d’être autorisé en loi de finances.

Pourtant, le traité prévoit bien que la France, par sa ratification, engage de fait sa garantie. En effet, l’article 9 du traité sur le MES prévoit explicitement le cas de figure où le capital serait appelé - son directeur général ayant d’ailleurs pour cela compétence liée (« le directeur général appelle », etc.) -, pour permettre au MES de faire face à ses obligations envers ses créanciers44(*). La souscription au capital appelable du MES constitue donc de facto une garantie analogue à celle accordée au FESF (même si on peut également envisager des cas de figure où le capital serait appelé pour d’autres raisons).

 

Dans le cas des augmentations récentes du capital appelable des banques de développement, le Gouvernement a fait le choix de prévoir une autorisation explicite en loi de finances (cf. l’article 103 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 201045(*) et l’article 84 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 201146(*)), ce qui peut expliquer que le Conseil constitutionnel ne se soit semble-t-il jamais prononcé sur la question. Le précédent du FESF rend toutefois difficile de ne pas se la poser dans le cas du MES.

 

Certes, comme le Gouvernement le souligne dans une réponse à une question posée à ce sujet par la commission des finances, l’article 53 de la Constitution prévoit que « les traités (...) qui engagent les finances de l’Etat (...) ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi ». Le Gouvernement considère que cet article conduit à écarter l’application de l’article 61 de la LOLF, soulignant qu’« aux termes de l’article 53 de la Constitution, disposition de valeur juridique supérieure à la LOLF, l’instrument de légalisation interne est une loi de ratification », et mettant en avant le précédent d’un accord avec Abu Dhabi47(*). Toutefois, dans la mesure où il n’y a pas de contradiction entre l’article 53 de la Constitution et l’article 61 de la LOLF, la nécessité d’écarter le second ne va pas de soi.

 

Dans ces conditions, il aurait été envisageable de prévoir un dispositif en deux temps :

- dans un premier temps, une autorisation, par le premier projet de loi de finances rectificative pour 2012, actuellement en cours de discussion, à engager la garantie de la France vis-à-vis du MES ;

- dans un second temps, une autorisation, par une loi ordinaire, de ratifier le traité instituant le MES.

 

A défaut, on se trouverait dans la situation paradoxale où une loi ordinaire autoriserait la ratification d’un traité comprenant des dispositions dont la LOLF prévoit explicitement qu’elles sont du domaine exclusif de la loi de finances.

 

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