Retraites complémentaires de France Telecom et de La Poste

31/05/2010 à 05h52, Auteur : rédac-rss // Droit, Finances, assurances

Une nouvelle proposition de loi, tendant à garantir la pérennité des retraites complémentaires des salariés du secteur privé,et sur les cotisations de la poste et de France Telecom avant la fin 2010.
« L’insupportable inégalité devant la retraite ». Avec ce titre sans détour, le Professeur Michel Godet signe une tribune politiquement incorrecte (Challenges, n° 205, 25 mars 2010, p. 40) dans laquelle il énonce que le régime des fonctionnaires, qui ne rassemble que 12 % des 22,5 millions d’ayants droit, concentre 31 % des pensions versées, si l’on en croit la répartition des 176 milliards d’euros de prestations du régime de base. À titre de comparaison, les retraités du régime général, qui représentent 54,2 % des pensionnés, perçoivent 48 % des pensions versées.
À cela, il faut ajouter une autre inégalité, souvent oubliée : le nombre d’années où l’on va profiter de sa retraite. À 35 ans, les ouvriers ont une espérance de vie inférieure de deux ans à celle des employés, et de six ans inférieure à celle des cadres. Ainsi qu’en conclut l’auteur de cet article : « ces chiffres sont socialement explosifs, c’est sans doute la raison pour laquelle ils ne sont jamais mis en avant ».
Les mêmes inégalités se retrouvent au niveau des régimes complémentaires. En effet, les pensions servies par les régimes complémentaires des salariés du privé – Agirc et Arrco – sont aujourd’hui, au regard des cotisations versées, beaucoup moins avantageuses que celles servies par l’Ircantec, régime de retraite complémentaire des fonctionnaires non titulaires et des élus locaux.
Le taux de cotisation Ircantec est de 5,63 % de la rémunération contre 9,50 % à l’Agirc-Arrco. Lorsque les salaires n’excèdent pas le plafond de la Sécurité sociale, c’est-à-dire 2 859 € par mois, un salarié du privé cotise, pour sa retraite complémentaire, près de 4 points de plus qu’un fonctionnaire contractuel. Au-delà du plafond de la Sécurité sociale, le salarié du privé cotise 5 points de plus.
Bien que les cotisations Ircantec soient inférieures à celles de l’Agirc-Arrco, les prestations accordées par l’Ircantec sont meilleures : le taux de rendement (11,40 %) est, aujourd’hui, près de deux fois supérieur à celui de l’Agirc (6,75 %) et de l’Arrco (6,64 %)
Dans les régimes de retraite par points, comme l’Ircantec et l’Agirc-Arrco, les cotisations versées par les actifs sont converties en points de retraite. Les points obtenus annuellement sont ainsi cumulés tout au long de la carrière des cotisants et, à la liquidation des droits, le montant de la retraite est déterminé en multipliant l’ensemble des points accumulés par la valeur de service du point. Au bout du compte, cela signifie que, à cotisation égale, les ressortissants de l’Ircantec bénéficient d’une retraite supérieure de 70 % à celle servie par l’Agirc-Arrco.
Certes, le décret n° 2008-996 du 23 septembre 2008 a prévu des ajustements pour maintenir l’équilibre financier de l’Ircantec : une hausse progressive des cotisations entre 2011 et 2017 et, d’ici 2017, le taux de rendement du régime devrait diminuer pour atteindre 7,75 %. Néanmoins, ce taux reste supérieur à ceux en vigueur, actuellement, à l’Agirc-Arrco. En outre, d’ici à 2017, les taux de ces régimes risquent également de diminuer dans des proportions similaires. Des taux qui ont déjà fortement chuté au cours de ces dernières années ; celui de l’Agirc, par exemple, est passé de 10,21 % en 1993 à 6,75 %.
Dans ces conditions, la mise à contribution de l’Agirc-Arrco pour compenser, pendant un demi-siècle, les pertes de recettes de l’Ircantec engendrées par la transformation en société anonyme de La Poste est des plus contestables. En effet, il a été décidé que les nouveaux embauchés de La Poste, à partir du 1er janvier 2010, seraient affiliés, en conformité avec le droit, non plus à l’Ircantec mais à l’Agirc-Arrco. Cependant, il convient de rappeler qu’au cours des dix dernières années, le nombre de cotisants à l’Ircantec a augmenté de 31,8 %, passant de 2,02 millions à 2,66 millions, plaçant le régime dans une situation bien plus favorable que celle de l’Agirc-Arrco.
Le projet de loi relatif au changement de statut de La Poste ne prévoyait pas que l’Agirc-Arrco verserait une soulte pour indemniser l’Ircantec d’un « manque à gagner » qui serait dû au fait que ce régime perdrait des cotisants. En réalité, ces fameux « cotisants » ne sont pas, aujourd’hui, affiliés à l’Ircantec. Il s’agit des futurs embauchés de la société anonyme « La Poste ». Pour beaucoup, même, ils ne cotisent nulle part, pour la bonne et simple raison que, trop jeunes, ils ne sont pas encore sur le marché du travail ! Comment un régime de retraite pourrait-il avoir des droits sur de futurs cotisants ? En outre, lorsque l’État et les collectivités locales ont recruté de nouveaux agents, au cours des dernières décennies, les régimes de retraite du privé n’ont pas été indemnisés, sous le prétexte que ces nouvelles embauches allaient réduire leur nombre de cotisants à venir !

Début mars 2010 (cf. Les Échos, 9 mars 2010), les discussions entre les gestionnaires des deux régimes ont achoppé sur le versement d’une compensation pour solde de tout compte, ce qui démontre bien l’iniquité du dispositif.
L’Ircantec étant un régime indépendant des régimes de droit commun et qui fonctionne par répartition, son avenir ne peut être assuré par la ponction de l’Agirc et de l’Arrco dont les affiliés ont consenti des efforts très importants pour maintenir l’équilibre financier des caisses. C’est la raison pour laquelle il est proposé de mettre un terme au principe même de cette ponction.

voici les propositions :
Le troisième alinéa de l’article 29-6 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et à France Télécom est supprimé.
Le dernier alinéa de l’article 29-6 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et à France Télécom est ainsi rédigé :
L’adhésion de l’entreprise La Poste à des institutions de retraite complémentaire visées à l’article L. 922-1 du code de la sécurité sociale intervient au plus tard au 31 décembre 2010.
 

Sénat proposition du 29 avril 2010

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